Derrière la falaise où habitent baobabs, varans et pintades se lève le soleil chaque matin pour nous rappeler cette lumière cachée quelques instants.
Aujourd’hui, comme tous les jours sa brillance a commencé à réchauffer l’aube après le chant du coq et des courlis, ces oiseaux à long bec qui mangent des mollusques cachés dans le sable. L’aurore de sa couleur blanche mariée aux jaunes puis aux marrons et aux verts des plantes, arbustes et arbres, qui n’ont pas encore perdus toutes leurs feuilles, s’est répandue calmement sur toute la colline. La saison sèche prend forme. La puissance du rayonnement avance jusqu’au bas de la falaise, à la naissance de la plage, et glisse doucement jusqu’à la première écume de vagues. La mer monte scintillante à ma gauche et sombre à ma droite mais deux pointes tanguent, non loin de la berge, une pirogue sans pêcheur. La nuit dernière on fêtait cette nouvelle année au son des vagues et sous les rayons des étoiles et de la lune, et ce matin cette solitude tangue au gré des eaux.
Suivre l’arrivée de chaque vague et observer si la pirogue va s’échouer. Suivre le mouvement des eaux et observer si la pirogue va couler. L’eau salée semble s’inviter allègrement au milieu de ce bois sculpté.
Le soleil de midi illumine les eaux traçant un chemin scintillant vers l’infini tandis qu’autour les verts, beiges et bleus rivalisent de multiplicité. La pirogue tangue, elle se trouve plus à l’ouest. Est-elle plus enfoncée dans la mer? Difficile à savoir de la rive. Au coucher du soleil, la danse des couleurs réchauffe le corps d’une satiété indescriptible. La pirogue tangue jusqu’aux derniers rayons du crépuscule. Les jours se succèdent et cette pirogue ne coule pas, ni ne s’échoue. Peut-être est-elle à l’image de ce monde prêt à mourir mais toujours là sur ces extrémités?
Elle prend l’eau mais elle résiste et flotte toujours. Je ne connais pas l’issue. Le temps est suspendu, il vogue entre marées et courants.
Après une semaine d’errance de cette pirogue qui se déplace peu en définitive, je demande au pêcheur, celui qui chaque petit matin fait glisser sa vieille petite pirogue vers l’écume, affronte les vagues et va pêcher non loin du bord. Solitaire au milieu des eaux, il est Un chaque matinée dans le tout.
Je lui demande : « Que se passe t-il pour cette pirogue? ».
Il m’explique clairement : « Te rappelles tu cette grande pirogue qui s’est échouée au début de la saison des pluies?
J’acquiesce de la tête. « Elle est restée dans le sable en bas de chez toi durant des mois et le bois a séché. Pour que la pirogue reprenne sa force et que le bois ne cède, il faut qu’on la laisse en mer, alors elle est là. Chaque jour, j’enlève un peu d’eau. ».
Pour vous aider à décrypter la belle allégorie de ce conte, lisez La preuve par 9 ! symbolique du 9, des eaux et du navire…